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Dans le cadre de la participation
de plusieurs membres du Mouvement Démocrate aux Conseils de quartier
de Nogent-sur-Marne, les signataires de ce document souhaitent apporter
leur contribution à l’enquête publique concernant le projet de Zone
de Protection du Patrimoine Architectural, Urbain et Paysager. Cette
contribution se situe dans le prolongement de la Tribune « Nogent passionnément »
parue dans le Nogent magazine du mois de mai (remise le 15 avril).
Nous demandons au Commissaire enquêteur d’émettre un avis défavorable sur le projet de la ZPPAUP, sur le principe duquel nous sommes favorables, et de recommander au Préfet du Val-de-Marne et au Maire de Nogent de surseoir à la mise en œuvre de ce projet.
Nous demandons la refonte de ce projet dans le respect des trois objectifs suivants :
- Il devra s’articuler avec un Plan Local d’Urbanisme (PLU) que nous appelons de nos vœux depuis plusieurs années.
- Il devra être profondément amendé tant en ce qui concerne son périmètre (multi zonage plus fin) que son règlement qui n’est pas « simple, clair et précis » et recèle nombre d’incohérences et de dispositions à clarifier ou à spécifier).
- Il devra faire l’objet d’une juste information et d’une réelle concertation avec les Nogentais.
Nous fondons notre position
tant sur des motivations qui relèvent de la forme ou de la méthode
que du fond, c’est-à-dire des principes ou idées directrices qui
guident les rédacteurs du projet de règlement devant régir la ZPPAUP
et encadrer les avis conformes des architectes des bâtiments de France.
Commentaires sur le fond et les idées directrices :
- L’enjeu structurant du
PLU : Nous regrettons tout d’abord que cette démarche ZPPAUP n’ait
pas été précédée d’une réflexion plus globale sur l’avenir
de la ville dans le cadre d’un PLU
(plan local d’urbanisme : Il faut rappeler ici que le PLU va bien au-delà
des dispositions techniques d’un Plan d’occupation des sols (POS).
Il définit le projet urbain de la ville à 30 ans au regard des prévisions
économiques et démographiques permettant ainsi d’anticiper les besoins
en matière de développement économique, d’aménagement de l’espace,
d’équilibre social de l’habitat, de transport (saturation du RER
A), d’équipement (carte scolaire, regroupement ou création d’établissements
et de services.) pour mieux articuler son passé
(sites et maison « remarquables » à préserver) avec son avenir :
- nouveaux modes d’habitat (familles recomposées, travail à domicile…),
- logement social dans le cadre de la loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbain), et plus généralement les enjeux de mixité sociale et de diversité
- développement durable - totalement ignoré dans le projet de règlement voire interdisant de fait l’installation de panneaux solaires ou certaines méthodes d’isolation thermique ou phonique -,
- circulations douces et pistes cyclables (non prévues dans la rue du Val de Beauté actuellement en pleine réhabilitation),
- dynamique commerciale au sein de la ville (vs nouvelles contraintes pesant sur la rénovation des vitrines des commerçants)
- accès des personnes à mobilité réduite (code de la construction et de l’habitation),
- positionnement de Nogent par rapport aux villes voisines dans la perspectives du Grand Paris, des recommandations du SDRIF (schéma directeur de l’île de France) ou plus près de nous de l’éventuelle fusion avec la ville du Perreux (perspective du redécoupage électoral en cours…). Sans oublier la mise en perspective les grands chantiers à venir (dont le zonage évite consciencieusement les contours tout en permettant le maintien d’un PLD modifié) : le pole RER A-Baltard, le Marché, l’ancienne école Marie Curie…
- en d’autres termes, la protection (la sanctuarisation diront certains) de la ZPPAUP ne doit pas devenir un alibi à des aventures architecturales et urbanistiques hasardeuses par ailleurs… qui contribueraient à renforcer la fracture sociale entre nos quartiers.
- Le périmètre de protection (géographique
et temporel): Nous regrettons que la municipalité se conforme à
la vision d’un cabinet d’architecture et d’urbanisme (aussi qualifié
soit-il) qui n’est pas parole d’évangile et qui porte par nature
un regard subjectif sur ce qui serait remarquable ou pas, à préserver
ou pas…
- Le périmètre proposé a
été volontairement calé sur le « Nogent historique » (de l’époque
des grandes propriétés bourgeoises des coteaux remontant jusqu’au
17ème siècle) et recouvre globalement l’ancien périmètre
des 500 mètres autour des monuments historiques…faisant l’impasse
sur d’autres sites pour autant remarquables à défaut d’être « prestigieux »…
tandis que la notion de maison remarquable exclue les bâtiments construits
après 1940. Nous préconisons :
- d’élargir la notion de maisons remarquables au concept de maisons « caractéristiques d’un style ou d’une époque » en s’autorisant à protéger des maisons postérieures aux années 40.
- de revenir à l’esprit de la « loi paysages » (« outil de gestion fine à la parcelle où à l’îlot ») pour redéfinir plus finement le périmètre protégé et adapter le règlement intérieur aux spécificités des quartiers/îlots /rues ainsi protégées (répartis dans tous les quartiers de notre ville) allant jusqu’à établir des fiches argumentées individualisées qui contribueront à la préservation des bâtiments de grand intérêt architectural (cf. ZPPAUP de la ville Enghien dans le 95).
- Outre que la première carte
communiquée aux Nogentais était erronée la seconde oubliait
de répertorier les maisons remarquables dans les quartiers qui n’ont
pas été retenus dans le zonage qui bénéficiera de la protection
de la ZPPAUP, donnant l’impression à ses habitants de vivre dans
un désert architectural voué à la convoitise des promoteurs :
- le boulevard de Strasbourg est-il l’axe d’une inévitable densification urbaine comme les quartiers oubliés par la ZPPAUP peuvent légitimement le craindre ?
- le quartier du port est-il destiné à accueillir l’essentiel des logements sociaux comme son conseil de quartier le craint ? au détriment d’une véritable mixité sociale découlant d’une répartition harmonieuse desdits logements pour éviter l’effet de ghetto…dont on connaît par avance les conséquences…
- Le périmètre proposé a
été volontairement calé sur le « Nogent historique » (de l’époque
des grandes propriétés bourgeoises des coteaux remontant jusqu’au
17ème siècle) et recouvre globalement l’ancien périmètre
des 500 mètres autour des monuments historiques…faisant l’impasse
sur d’autres sites pour autant remarquables à défaut d’être « prestigieux »…
tandis que la notion de maison remarquable exclue les bâtiments construits
après 1940. Nous préconisons :
- Les imprécisions du projet
de règlement intérieur de la ZPPAUP (non distribué à la population)
: pour que l’architecte des bâtiments de France puisse statuer dans
le cadre du règlement de la ZPPAUP ce dernier se doit d’être « simple,
clair et précis » pour être opérationnel et ne pas susciter une multitude
de recours.
- Nous proposons de préciser les expressions floues du type retour à « l’état d’origine », la référence à des « dérogations mineures » ou à des « clôtures traditionnelles », en joignant au règlement un glossaire et des schémas illustratifs.
- Nous proposons une action concertée avec les commerçants de Nogent pour valider les nouvelles contraintes préconisées par le règlement intérieur (façades des commerces, accès des personnes à mobilité réduite, places de stationnement…), en relation avec les grands chantiers exclus du périmètre de la ZPPAUP qui accueilleront probablement de nouvelles enseignes (chantier RER A et marché central).
Commentaires sur la forme et la méthode :
- Le délai d’enquête publique initialement limité à un mois est évidemment beaucoup trop court (même prolongé de 15 jours sur une période encombrée de ponts et comprenant deux semaines de vacances scolaires), 6 demi-journées de présence du Commissaire enquêteur, uniquement en semaine dont deux pendant la première semaine de l’enquête, alors que la population est majoritairement active à Nogent…). Il faut rappeler que la municipalité a mis plusieurs années avant de présenter ce projet aux Nogentais (le premier rapport du cabinet Blanc-Duche date de 2003, lui-même précédé du travail sur le POS de l’équipe municipale précédente).
- Les outils de présentation
du projet s’apparentent plus à des outils de communication (sur le
bien fondé de la démarche dans des termes génériques destinés à
susciter l’adhésion sur le principe) qu’à des outils d’information (mettant
en exergue les avantages et les inconvénients d’un tel projet, à
l’aune notamment de l’expérience des plus de 550 ZPPAUP existant
en France) :
- Un dépliant déposé dans les boîtes aux lettres postérieurement au démarrage de l’enquête publique, présentant une carte erronée (intégrant le quartier du port) ;
- Un lieu unique et excentré (les services de l’urbanisme situés à proximité du Perreux) de consultation des documents communiqués (copies payantes) dans le cadre de l’enquête publique, alors que la municipalité avait consacré bien davantage de moyens pour expliquer le projet Orbival (il est vrai quelques mois avant les municipales) en de multiples endroits dans la ville…
- Une absence totale d’information
nominative des propriétaires des maisons concernées par le périmètre
de protection (quel que soit leur degré d’intérêt architectural)
malgré les demandes répétées faites au Maire (et notamment par voie
écrite préalablement à la réunion du 9 avril des représentants
délégués par les conseils de quartier). A partir du moment ou un
propriétaire ne peut pas s’opposer à figurer dans la liste des maisons
remarquables ou dans le périmètre de protection il nous paraît indispensable
que la municipalité veille à lui assurer une information complète
et objective, présentant les avantages (préservation de son environnement
voire appréciation de la valeur de son bien et des biens environnants)
et les inconvénients (surcoûts liés aux contraintes imposées dans
le règlement) à attendre de ce « classement ».
- Quelles sont les conséquences juridiques et financières du classement des sites ou « maisons remarquables » ? (notion de « servitudes d’utilité publique » qui seront reportées sur les certificats d’urbanisme par exemple à l’occasion de la revente).
- Les propriétaires concernés bénéficieront-ils des dispositions des « secteurs sauvegardés » ? (comme évoqué par le Maire lors de la réunion du 9 avril) pour faire face aux surcoûts occasionnés par les obligations nouvelles à respecter en matière de travaux et du fait de l’obligation de recourir à un Architecte des bâtiments de France pour obtenir son « avis conforme ». Face aux surcoûts de l’entretien des maisons concernées et faute d’aides attribuées au nom de l’intérêt général (par la ville, le département…), il est probable que certains propriétaires renoncent à réaliser des travaux et que leurs maisons finissent par se dégrader… ce qui serait pour le moins en contradiction avec le projet…
- Une absence de moyens consacrés
aux Conseils de quartier :
- Absence de réponse à certaines
questions clés adressées aux porteurs du projet de ZPPAUP, le maire
en particulier. À titre d’exemple le conseil Beauté-Baltard n’a
pu obtenir les informations suivantes :
- Liste comparative des maisons remarquables entre le POS, le premier relevé du cabinet Blanc et le projet de périmètre validé par le conseil municipal le 15.12.08
- Fiche descriptive justifiant les raisons pour lesquelles le cabinet Blanc-Duche a considéré que telle ou telle maison présentait un intérêt architectural remarquable.
- Engagement formel de la municipalité à donner pour mission aux conseils de quartier de participer à l’information des Nogentais sur le projet de ZPPAUP au-delà de la clôture de l’enquête publique (liste modifiée des maisons remarquables, modification du périmètre de protection, amendements du règlement intérieur de la ZPPAUP…) et de préciser les modalités de représentation des conseils de quartier lors des débats qui seront consacrés à la ZPPAUP dans le cadre du conseil municipal.
- Suspension (suppression définitive ?) de la parution des tribunes des conseils de quartier dans le Nogent magazine du mois de mai (celle du conseil Beauté-Baltard portait précisément sur la ZPPAUP), vecteur principal de l’information des Nogentais ;
- Impossibilité matérielle (intentionnelle ?), compte tenu des délais imposés ou du manque de moyens (imprimer et distribuer les invitations), pour la plupart des conseils d’organiser des réunions publiques sur le projet de ZPPAUP (à titre d’exemple la réunion du conseil Beauté-Baltard programmé le 12 mai soit trois jours avant la date limite de l’enquête à été annulée par son Président).
- Absence de réponse à certaines
questions clés adressées aux porteurs du projet de ZPPAUP, le maire
en particulier. À titre d’exemple le conseil Beauté-Baltard n’a
pu obtenir les informations suivantes :
- Absence de représentant de la municipalité et du cabinet Blanc-Duche lors de l’unique soirée publique (6 mai) consacrée au projet de ZPPAUP par une association connue pour sa neutralité politique (le Forum Politique Nogentais) et sa volonté de susciter l’intérêt des nogentais pour le débat démocratique. Cette politique de la chaise vide témoigne une fois encore de l’embarras de la municipalité (sur les objections de fond notamment) et d’un manque manifeste de concertation.
Le lancement d’une
enquête publique sur le projet de
ZPPAUP signifie qu'il y a un enjeu démocratique fort et que chacun
doit pouvoir, une fois informé, donner son avis de citoyen encore faut-il
que le Préfet, par l’entremise du Commissaire enquêteur s’assure
que ce soit le cas.
En conclusion
A l’analyse, tout porte
à croire que l’on confond vitesse et précipitation (alors
que le projet a été initié en 2002…) : rien n’est véritablement
entrepris pour s’assurer d’un consentement
éclairé des Nogentais sur un projet qui les concerne tous (qu’ils
soient dans la zone ZPPAUP ou pas) et pour longtemps !
C’est pourquoi,
faute d’une véritable concertation nous demandons au Commissaire
enquêteur d’émettre un avis défavorable sur ce projet.
Si la recherche d’un juste équilibre entre les intérêts particuliers (les propriétaires des maisons qui seront décrétées « remarquables ») et l’intérêt général (la préservation du patrimoine nogentais) n’est certes pas chose facile, il est nécessaire d’informer les Nogentais de tous les impacts de ce projet et de prendre le temps de susciter un débat entre citoyens responsables. Comment préserver sans figer pour évoluer avec son temps ? comment concilier intérêt général (mixité sociale, valorisation du patrimoine commun…) et intérêts particuliers ?
C’est pourquoi nous proposons plusieurs mesures pour assurer une meilleure information des Nogentais tant sur la refonte de la ZPPAUP que sur l’élaboration du PLU :
- Intégrer à l’avenir les enjeux du développement durable dans les projets
- Partager les enseignements des autres villes qui ont entrepris de telles démarches et en particulier de la ville d’Enghien (95) pour la ZPPAUP.
- Mobiliser les compétences de cabinets conseils, non pas pour se conformer à leur vision, mais pour nourrir les discussions à engager avec les nogentais sur les différents scénarii envisagés pour leur ville.
- Ouvrir officiellement une nouvelle période de discussion avec les conseils de quartiers afin de permettre une profonde refonte du projet.
Nous proposons d’identifier sur une carte l’ensemble des maisons remarquables de Nogent et de préciser que d’autres outils permettront de les protéger à l’avenir (POS aujourd’hui, PLU demain) au-delà de la ZPPAUP remaniée que nous appelons de nos vœux.
Nous préférons faire le pari de l’intelligence et de la concertation en prenant le temps d’informer complètement et objectivement nos concitoyens pour les inciter à devenir acteurs de leur ville ! Aussi nous suggérons à la municipalité « d’informer » plutôt que de « communiquer » en partant du principe qu’un citoyen informé n’est pas nécessairement un empêcheur d’avancer ! Ayons le courage d’une véritable démocratie locale et participative, apte à responsabiliser les Nogentais et à canaliser les énergies et les bonnes volontés !
Signataires
Commentaires